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Jeroen Mentens

La nature, l’alliée de la santé mentale

La santé mentale de plus en plus de Belges est mise à mal. Pour tenter de réduire le stress, prévenir la déprime, rendre plus heureux ou apaiser l’anxiété, la nature peut être une excellente piste. De plus en plus d'études démontrent les effets positifs des espaces verts sur notre santé psychologique et physique.

Cela fait bientôt un an que la pandémie a bouleversé nos modes de vie, nos habitudes, nos relations, notre rapport aux autres. Des changements qui ont des impacts conséquents sur notre santé mentale. L’Organisation Mondiale de la Santé l’affirme : "la mauvaise santé mentale est devenue une pandémie parallèle". Selon elle, 50% des jeunes âgés de 18 à 29 ans sont sujets à la dépression et à l’anxiété, de même que 20% des professionnels de santé. Des chiffres très interpellants alors que les experts belges parlent d’une potentielle troisième vague.

Si les relations sociales sont essentielles, d’autres solutions peuvent néanmoins soulager les personnes souffrant de problèmes de santé mentale. Balades dans un parc, jogging en forêt ou pique-nique au soleil… peuvent être très bénéfiques pour notre bien-être. Depuis des années, de nombreuses études démontrent que la nature a des effets sur notre santé psychologique et physique. Les scientifiques surnomment même les bienfaits du contact avec la nature "Vitamine G", "G" pour "Green". "Différentes formes d'exposition à la nature ont été associées à un meilleur bien-être émotionnel, une plus grande résilience, une meilleure humeur, mais aussi à des cas plus faibles de troubles mentaux tels que la diminution des symptômes de stress, les troubles d'hyperactivité avec déficit de l'attention et la dépression", affirme Ann Desmet, professeure et chercheuse en psychologie de la santé à l’ULB.

De nombreux bénéfices

Le contact avec la nature peut donc avoir de nombreux bénéfices : diminution des niveaux de violences et amélioration de la cohésion sociale, réduction des maux de tête ou encore stimulation de la créativité. Plusieurs paramètres peuvent être pris en compte pour expliquer ces bienfaits. Pour l’experte belge, les effets positifs peuvent être liés à des causes externes de stress et de frustration, telles que la pollution atmosphérique et le bruit. "Avec une densité d'arbres plus élevée, par exemple, ces facteurs de stress et de frustration peuvent être plus faibles. Le contact avec la nature semble avoir une fonction réparatrice, qui augmente notre capacité à gérer le stress auquel nous sommes confrontés, cela nous aide à recharger nos batteries."

Elle appuie également sur le fait que notre exposition à la nature peut être associée à d’autres comportements qui ont des effets positifs sur la santé mentale, comme l’activité physique (marche, course, vélo…) ou les interactions sociales si l’on va se promener avec un ami. "Le fait que le simple fait d'avoir une plante en pot dans votre chambre ne semble pas avoir les mêmes effets que de se promener dans un espace vert, semble confirmer le fait que l'activité physique y est aussi pour quelque chose, bien que le simple fait d'avoir une vue sur un espace vert à l'extérieur ait montré des effets positifs sur la santé mentale, et l'activité physique n'explique certainement pas tout. Avoir plus d'espaces verts et bleus dans le quartier peut augmenter le nombre de personnes dans le quartier qui sortent et augmenter la cohésion sociale, ce qui peut aussi avoir un impact sur la santé mentale."

L’importance des espaces naturels en zone urbaine

"La nature est ici considérée très largement. Nous n'avons pas tous à faire des excursions dans la jungle pour ressentir des effets positifs sur la santé mentale. La plupart des études sur la nature en relation avec la santé mentale ont porté sur par exemple les jardins, les parcs publics, la présence d'une rivière à proximité, ainsi que sur la marche en forêt ou en milieu rural", explique l’experte en santé mentale. Les zones naturelles sont donc importantes lorsque l’on sait que l’urbanisation a des effets négatifs sur la santé mentale et que la Belgique est l’un des pays les plus urbanisés d’Europe : 97% de ses 10 millions d’habitants vivent dans une zone urbaine.

La dégradation de la santé mentale de la population belge ne date cependant pas de la crise sanitaire. Selon une enquête nationale de santé la proportion de répondants présentant des difficultés psychologiques est passée de 25% à 32% entre 2008 et 2013. Ces symptômes sont notamment plus prévalents en Région de Bruxelles-Capitale (40%) qu’en Wallonie (35%) ou en Flandre (29%). Une étude est actuellement en cours pour évaluer l’impact des environnements construits et non construits, l’air et la pollution sur le bien-être mental des Bruxellois. Peu de recherches de ce type ont jusqu’à présent été menées dans notre pays et notre capitale.

"Ce n'est pas parce que vous vivez en milieu urbain que vous êtes par définition déconnecté de la nature. Les espaces verts, par exemple les parcs, et les espaces bleus, par exemple les endroits où marcher à côté d'une rivière, dans les villes peuvent également avoir des effets positifs sur la santé mentale. C'est pourquoi les initiatives dans certaines villes de désenclavement des rivières qui ont été couvertes au fil des années, pour par exemple créer de l'espace pour des routes ou des parkings, se ré-ouvrent et offrent une exposition aux plans d'eau en milieu de ville, sont une bonne idée", souligne Ann Desmet. La chercheuse prend en exemple une étude menée au Japon qui a démontré que sortir dans la nature ou simplement pouvoir voir la nature de l'intérieur contribuait à augmenter les niveaux d'estime de soi, de satisfaction à l'égard de la vie et de bonheur subjectif et à réduire les niveaux de dépression, d'anxiété, et la solitude pendant la crise COVID.

Un sentiment de revitalisation

Tout le monde le sait : le sport est bon pour le corps. Mais il ne faut pas non plus négliger l’impact de l’activité physique sur le cerveau et la santé mentale. Selon Ann Desmet, l’activité physique pour être encore plus bénéfique lorsqu’elle se pratique à l’extérieur. "L'exercice à l'extérieur crée un plus grand sentiment de revitalisation et d'estime de soi, moins de tension, d'anxiété, de sentiments de dépression et de confusion, et un plus grand plaisir perçu et un plan pour continuer l'activité d'exercice dans le futur que l'exercice à l'intérieur."

Il ne faut pas non plus être un grand sportif, devoir faire un jogging d’une heure ou programmer toute une journée en forêt pour ressentir les effets. Une exposition courte, de 5 à 10 minutes, est déjà bénéfique comparée à aucune exposition du tout. Comme le relève la professeure à l’ULB, certaines études suggèrent qu’au moins 30 minutes d’exposition  par semaine peut avoir un effet sur la réduction des symptômes dépressifs. "Il semble qu'avoir une certaine exposition ou une certaine vision de la nature vaut mieux que rien, et qu'autrement essayer d'obtenir une exposition régulière dans la mesure de ce qui est possible pour la personne est utile, car cela peut augmenter le lien social avec les autres", assure Ann Desmet.

"Au moment de décider quoi faire: choisissez quelque chose qui correspond à ce que vous aimez, qui déclenche votre curiosité et vos sens, qui vous donne l'impression de pouvoir vider votre tête, qui vous fait sentir partie d'un tout plus vaste. Si vous le pouvez, allez avec quelqu'un dans votre bulle et faites quelque chose d'actif, marchez ou faites du vélo. Si vous n'avez pas d'accès ou de temps pour vous promener, le simple fait de regarder la nature peut aussi vous faire du bien!"

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Différentes initiatives à tester

Pour sensibiliser les gens aux bienfaits offerts par la nature, plusieurs initiatives ou programme ont vu le jour. On retrouve notamment la campagne 30-30,  qui promeut une activité physique quotidienne de 30 minutes dans la nature pour une durée de 30 jours.

Un temps consacré à se reconnecter avec soi-même, à profiter de l’instant présent et se focaliser sur soi-même. Pour plutôt en profiter collectivement et avec un objectif en ligne de mire, le Mind Matters Marathon pourrait vous intéresser. Lancée il y a quelques mois, cette initiative veut vous préparer à un marathon et en même temps récolté des fonds pour la santé mentale.

Si vous avez besoin d’un accompagne et d’une expérience plus immersive, de nombreux coachs utilisent la nature comme vecteur d’expression. Plutôt que de discuter à l’étroit dans un bureau, ces derniers invitent plutôt à se balader en forêt le temps d’une séance. C’est notamment ce que propose Inside Nature qui met la nature au cœur du processus pour renouer avec sa propre nature intérieure.