La NorthSealTeam tire la sonnette d’alarme : laissons les phoques tranquilles!
En ce moment, les phoques de la côte belge connaissent une véritable période de baby-boom. Leurs « adorables » chiots attirent tous les regards, au point qu’une équipe de bénévoles doit se déplacer pratiquement tous les jours pour les protéger des regards indiscrets. Les badauds se rapprochent beaucoup trop et tentent même d’interagir avec les animaux, ce qui leur cause un stress immense. La semaine dernière, Sea Life Blankenberge a dû intervenir pour emmener un jeune phoque vers un endroit plus calme.
Inge De Bruycker a assisté à ce drame depuis les premières loges. Au printemps 2020, elle a décidé de se lancer comme « ange gardien » des phoques belges et a créé la NorthSealTeam avec Colette De Meyer. Elle nous explique comment les événements ont pu prendre cette tournure.
Chasseurs de selfies et autres gêneurs
« Ce week-end, nous avons reçu pas moins de 6 alertes provenant d’endroits différents. C’est du jamais-vu ! Nos bénévoles sont arrivés sur place pour maintenir le public à distance et leur expliquer en quoi leur comportement était problématique. Les touristes d’un jour ne sont sans doute pas habitués à croiser un phoque sur la plage, nous comprenons donc qu’ils ne sachent pas toujours comment se comporter. Leurs intentions sont louables quand ils essaient de remettre un phoque en parfaite santé à la mer ou de l’humidifier, car ils ont probablement retenu des films mettant les dauphins en vedette que ces animaux aquatiques meurent si leur peau sèche. Mais si les phoques viennent à terre, c’est pour une bonne raison : ils veulent reprendre leur souffle, et cela peut prendre plusieurs heures, voire plusieurs jours. Ils ne sont ni malades, ni affamés », souligne Inge.
« Par contre, c’est bien plus grave quand les gens s’attroupent autour des phoques et tentent à tout prix de prendre un selfie. Certains les poussent à l’aide d’un bâton pour les faire bouger et les filmer. La semaine dernière, quelqu’un a même lâché son chien sur notre vieux phoque Oscar. Atroce ! Ce week-end, la situation a dégénéré à Knokke. Trois bénévoles étaient sur place et ne parvenaient pas à calmer la foule. La police a dû intervenir, mais elle ne pouvait pas rester sur place toute la journée. Dès qu’elle est partie, la folie a repris de plus belle. »
« Finalement, nous avons décidé en concertation avec Sea Life Blankenberge d’emmener l’animal. Cela nous a brisé le cœur, car nous voulons interagir le moins possible avec la nature. Les sauveteurs n’avaient encore jamais dû emmener un animal en bonne santé, et cela n’aurait jamais dû arriver. Mais le bien-être du jeune phoque était compromis ; le stress du transport vers un endroit plus calme était moins intense que celui enduré à cause des touristes. Vous imaginez ?! » Quand elle raconte cette histoire, Inge semble encore bouleversée.
La nouvelle maternité des phoques gris
Cependant, Inge a vécu bien d’autres aventures au cours de l’année qui s’est écoulée : « Nous voyons des phoques sur nos rivages depuis déjà un certain temps, surtout sur la plage Klein Strand à Ostende, dans la réserve naturelle De IJzermonding et le port de Nieuport. Je suis moi-même originaire d’Ostende, et j’ai bien vu que les animaux qui tentaient de se reposer étaient à nouveau dérangés par la recrudescence du tourisme après le premier confinement. Je me suis inquiétée, tout comme Colette. Pendant un mois, nous nous sommes relayées pour veiller sur les phoques. Heureusement, des bénévoles supplémentaires se sont rapidement manifestés et nous avons occupé les lieux en faisant des tours de garde de 4 heures. »
Mais pourquoi les phoques multiplient-ils leurs lieux d’apparition ? « Auparavant, nous constations surtout la présence de spécimens adultes, qui avaient leur coin préféré et se reposaient sur la rive », explique Inge. « Mais ces derniers mois, nous avons aperçu des bébés phoques gris, qui viennent au monde entre novembre et janvier. Les naissances se produisaient surtout en Angleterre, mais il est très probable que les femelles mettent à présent bas dans les environs. Entre-temps, nous avons dénombré 25 chiots. Juste après leur naissance, ils sont recouverts d’une épaisse fourrure, qui les empêche de nager. Leurs mères les placent donc en hauteur et bien au sec sur la plage, loin de la marée. Après environ trois semaines d’autonomie, ils ont encore le réflexe de se reposer sur la plage. Ils sont alors très vulnérables, car ils sont incapables de retourner rapidement à l’eau. »
Agrandissement de l’équipe et subsides publics
Comme les jeunes phoques apparaissent un peu partout sur la côte, l’équipe a dû s’agrandir : « Aujourd’hui, nous sommes une septantaine. Dans l’idéal, nous voudrions avoir une dizaine de bénévoles par commune. Nous avons encore besoin de volontaires entre Ostende et Knokke. Nous disposons maintenant d’un numéro central que les gens peuvent appeler quand ils aperçoivent un phoque. Nous avons un groupe WhatsApp par commune et nous nous arrangeons pour qu’un ou plusieurs bénévole(s) se rende sur place aussi vite que possible. Le gouverneur de Flandre occidentale nous a aussi promis des subsides provinciaux. Bientôt, nous aurons tous un gilet orange et un badge, nous déposerons des flyers dans les hôtels et les centres d’informations touristiques et nous placerons des panneaux informatifs mobiles sur les plages occupées par les phoques. »
En plus du soutien logistique, les bénévoles pourront bientôt compter sur des outils professionnels : « Nous ne sommes pas des experts en phoques, juste des personnes dotées d’un grand cœur. Nous voulons faire notre job du mieux possible et travaillons en collaboration avec Sea Life Blankenberge pour former tous nos membres. De plus, nous souhaitons mettre à disposition un livret qui répond aux questions les plus fréquemment posées par les passants. Chaque bénévole sait désormais de combien de poissons un phoque a besoin pour vivre, comment différencier un phoque gris d’un phoque commun ou déterminer quand ils ont besoin d’aide. »
Les aventures d’Oscar et compagnie
À l’heure actuelle, personne ne sait comment se porte Oscar, le vieux phoque victime d’un chien agressif. Depuis l’attaque, il n’a plus été signalé sur nos plages. La page Facebook de la NorthSealTeam partage chaque jour des informations sur tous les phoques belges et les bénévoles espèrent avoir rapidement des nouvelles d’Oscar. Attention : les photos et anecdotes ne sont mises en ligne que quand les animaux ont repris le large. Nul besoin d’attirer davantage l’attention sur eux.
En plus d’Oscar, qui est vite devenu la mascotte de l’équipe, de nombreux phoques sont baptisés par les volontaires. « Chaque phoque a un pelage qui lui est propre et ses caractéristiques, et ils ont tous un caractère différent », raconte Inge. « La plupart du temps, nous leur donnons un nom. Cela facilite la communication et nous permet de mieux suivre leur vie. Mes préférés sont Louis et Pinokkio, deux phoques joueurs qui viennent faire leurs pitreries à Ostende. Ils traversent la plage Klein Strand et jouent avec la bouée qui flotte dans l’eau. J’ai aussi un coup de cœur pour Jumper (celui d’Ostende, car Nieuport a aussi son Jumper). Je suis toujours ravie de l’apercevoir : il saute hors de l’eau comme un dauphin ! J’adore aussi Jack, qui a l’air d’avoir un cache-œil comme Jack Sparrow, et Poseidon, un énorme mâle. »
L’amour d’Inge pour ses phoques est plus qu’évident. Il est grand temps que le reste du monde apprenne comment se comporter en présence de ces habitants de la plage si particuliers. Voici les règles à respecter absolument :
- Restez à une distance minimale de 30 mètres
- Tenez vos chiens en laisse et éloignez-les des phoques
- Ne faites aucun bruit ni mouvement brusque
- Ne vous placez jamais entre la mer et les phoques, afin qu’ils puissent s’enfuir si besoin
- Vous pouvez prendre des photos, mais à distance respectueuse
- Gardez leur localisation secrète
- Appelez la NorthSealTeam si vous constatez qu’un phoque a besoin d’aide : 0491/ 74 32 78